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Correspondance relative à Auguste de SURIREY de SAINT REMY



Lettres du Général de WACQUANT à sa sœur Thèrèse de SURIREY de SAINT REMY :

Epinal le 21 septembre 1852
Tu as raison, ma chère amie de ne pas douter lorsque tu m’as prié de recommander ton fils Auguste au colonel Bert, commandant le 3e d’infanterie de Marine, de ne pas douter, dis-je de mon empressement à faire une chose qui te soit agréable. Aujourd’hui même j’ai écrit à ce dernier pour lui parler d’Auguste dans des termes qui j’espère, ajouteront encore à l’intérêt qu’il semble lui porter déjà. Je le prie de me faire connaître vers quelle époque il peut y avoir utilité de ma part à faire au ministère de la Marine, une démarche en faveur de ton fils, en lui tmignant aussi le désir (si ce dernier s’en rend digne) de le voir s’associer à ma démarche par une intervention particulière qui la rendrait bien plus efficace attendu que l’appui du colonel est toujours l’aide la plus puissante en pareil cas. Enfin je montre au colonel Bert la sollicitude si naturelle en faveur d’un parent qui me touche de si près.
Pour le moment il ne m’est possible de rien faire de plus et il est même nécessaire que la combinaison dont je viens de parler soit aidée de tous les efforts d’Auguste pour rendre sa conduite irréprochable et justifier ainsi autant que possible l’intérêt qui se prépare en sa faveur : ce n’est même qu’à cette condition qu’il peut y avoir bon espoir de succès.
Je te remercie des détails que tu me donnes sur tes autres enfants et qui indiquent quelque chose de mieux dans la position de chacun d’eux. bien que le mieux soit encore loin du bien-être, il faut cependant se montrer satisfait, car en définitive c’est augmenter son inquiétude sans aucune espèce de compensation, que de ne pas s’armer de résignation pour supporter tous les soucis de la vie.
Je ne sais si mon séjour se prolongera beaucoup à Epinal. Je n’y suis pas bien installé et je n’ai rien à faire qui puisse intéresser ma vie militaire. Il serait donc possible que je reçusse un ordre de changement que j’ai provoqué par une demande particulière.
Toute ma maison va bien, mais je ne me plais pas ici.
Je t’embrasse de tout cœur.

De Wacquant




Epinal le 2 novembre (1852)

Je t’envoie ma chère amie la copie textuelle de la lettre que j’ai reçue dernièrement du Colonel du 3ème d’infanterie de marine en réponse à celle que le lui ai écrite au sujet de ton fils. Tu verras d’une manière plus précise par cette réponse que si les chances d’avancement pour Auguste ne peuvent compter avant le temps voulu pour qu’il soit proposé, il est cependant sûr d’être appuyé à cette époque si sa conduite est assez bonne pour qu’il puisse être présenté.
Le Colonel Brunot qui paraît par sa lettre un homme sérieux et positif ne pense m’en dire davantage et j’ai autant confiance dans ce genre de paroles que dans les promesses légères qui ne sont pas tenues la plupart du temps.
En résumé ce document que je t’envoie pour te servir de texte pour chapitrer ton fils par les recommandations que tu jugeras convenables, sans pour autant lui envoyer le double de la lettre du Colonel Brunot, ce qui se saurait d’une manière ou d’une autre et pourrait faire du tort à Auguste.
Avant tout, qu’il se conduise bien et de manière à être classé comme méritant , c’est le plus sûr moyen de faciliter le succès pour son avenir : car pour le peu qu’il réfléchisse il comprendra qu’il n’est guère possible de réussir quand on appuie un sujet mal noté.

J’espère ma chère amie que ta santé va de mieux en mieux. Nous nous portons tous bien ici.
Bien à toi.
W




Lettre du Colonel Brunot au Général de Wacquant :

3ème régiment d’infanterie de marine
Toulon le 26 octobre 1852

Mon général,
Ce n’est pas avec moi que vous êtes entré en relation relativement au sergent de Surirey qui fait l’objet de votre lettre du 21 du mois courant mais bien avec mon collègue du 2ème régiment auquel ce sous-officier a appartenu jusqu’au 1er avril dernier, jour de son passage au 3ème.
De Surirey m’est à peu près inconnu, n’ayant entendu parler de lui que par une lettre qu’il m’écrivit pour demander à ne pas suivre sa compagnie à Cayenne, devant disait-il, quitter incessamment le service. Cette demande ne put être accueillie parce qu’il n’y avait alors ici qu’un nombre fort restreint de sergents disponibles pour le service colonial.
Les chances d’avancement du sous-officier dont il est question sont aujourd’hui absolument nulles puisqu’il ne compte que 9 mois de grade et qu’il faut 2 ans au moins pour arriver à la sous-lieutenance.
Lorsqu’il sera en mesure d’être proposé je me souviendrai de votre recommandation et si, comme je ‘espère, il mérite que l’on s’occupe de lui je ne manquerai pas de le faire.
Je suis respectueusement, mon général
Votre très humble et très obéissant serviteur.

Le Colonel Brunot.





En face des Dardanelles le 5 juin 1855.
   
                Ma chère Fanny,

    Je profite d'une occasion qui s'offre à moi pour te donner signe de vie. Embarqués à Toulon (où j'ai reçu ta dernière et bonne lettre) le 9 mai nous n'avons pu encore franchir cet horrible détroit où le vent nous retient depuis 15 jours, juge un peu de notre état, nous sommes un millier d'hommes entassés sur un bâtiment à voiles le Jemmapes et nous ne savons quand nous pourrons arriver en Crimée dont nous recevons des nouvelles, nous avons tous une peur effroyable d'arriver après les affaires terminées. Jamais je ne me suis tant ennuyé de ma vie. Nous n'avons cependant pas 200 lieues à faire. Tu pourras m'écrire en mettant cette adresse: Mr de Surirey S-officier au 4e bataillon du 26 e de ligne à Constantinople (En cas de départ faire suivre.)
    Comme je te l'ai promis, je veux travailler sérieusement à mon avenir, il faut employer toutes les cordes de nos arcs - ainsi je crois que tu peux écrire à Madame d'Hervillers   qui lors de mon voyage à Verdun m'a offert son crédit près de son beau-frère Mr le Général d'Hautemard   qui est en Crimée, et si tu vois madame Niol  , pousser toujours un peu à la roue. Mr l'abbé de Failly m'avait aussi offert d'écrire à son cousin le Gal de ce nom, je crois qu'il va rentrer en France, si cette nouvelle est fausse je lui écrirai à ce sujet. Si Mr Christophe   écrivait à Mr de Sorbier mon Colonel  cela me ferait le plus grand bien, tache de lui dire si cela est possible. Nous avons pour Lt Colonel Mr le Baron Nicolas, le fils du Gal Nicolas, retraité près du Chesne   et que Mon oncle de Wacquant   a parfaitement connu. C'est un excellent militaire, il a beaucoup de poids dans la balance. Voilà tous les renseignements que je puis te donner . parlons d'autre choses, j'ai tout à te dire et j'ai si peu de tems qu'il te faudra beaucoup de bonne volonté pour me lire. Comment va ta marquise   , cela m'inquiète non pour elle mais pour toi, donne-moi des nouvelles de tout le monde dis à Alix que je n'ai pu lui répondre. Je comptais avoir des nouvelles de Pol, cette paresse n'est pas bon signe, je ne puis écrire à maman, embrasse-la pour moi je ferme ma lettre, on la réclame. Adieu, je t'embrasse de tout mon cœur, à bientôt, adieu encore ma bonne sœur.
Tout à toi pour la vie
Ton frère qui t'aime bien

Ate de Surirey

 



Devant Sébastopol le 23 juin 1855.

Ma chère Fanny

Tu as sans doute été inquiète de n'avoir pas de mes nouvelles, je t'ai écrit des Dardanelles où notre infâme bateau nous a fait stationner 8 jours, histoire répétée par 3 fois différentes. Nous avons mis 43 jours pour arriver ici où nous sommes depuis hier. Décidément mon étoile à changée. Je bénis tous les jours ceux qui ont eu l'heureuse idée de me faire entrer dans ce régiment. Je crois que l'on a choisi les hommes pour le composer et cela depuis le Général en chef jusqu'au dernier soldat. Je suis le secrétaire de Mr de Sorbiers notre colonel qui est le plus charmant homme que l'on puisse voir. Ce matin j'ai été déjeuner avec Mr Niol, figure toi l'homme par excellence. Lorsque tu verras madame Niol dis lui je t'en prie, combien je voudrais pouvoir me montrer reconnaissant. C'est donc à Mr Christophe que je dois en partie tout cela, maintenant je suis je crois dans les meilleures conditions pour arriver à l'épaulette. Comme soldat voyant le feu pour la 1ère fois je ne puis dire ce que je ferai, cependant il me semble que cette partie là ne me sera pas défavorable. Je ne te donne aucune nouvelle des affaires parce que d'abord on ne peut jamais raconter véridiquement, Sébastopol n'est pas pris mais nous espérons que cela ne tardera pas. Ce qui me fait te dire que l'on ne peut raconter véridiquement c'est que 10 hommes assistent à la même affaire et tous la racontent différemment. Je vais te quitter, je suis fatigué, je t'écrirai souvent, je ne te promets pas de t'écrire toujours bien longuement. Tu seras mon messager près de notre mère, d'Alix, de ce paresseux de Pol qui se repentira peut--être comme me le disait encore ce matin Mr Niol d'être allé s'engager dans la cavalerie  . Dans l'infanterie il aurait fait la guerre c'est vrai; hé bien pour un militaire c'est ce qu'il y a de plus beau . On se traite très bien ici. On a beau dire on se dévoue bien plus à son pays quand il fait preuve d'autant de bonté envers ses enfants; allons, adieu, je t'embrasse et vais attendre ta réponse. Fais la longue, adieu encore je t'embrasse comme je t'aime c'est de tout mon cœur.
Tout à toi
Ton frère
A  te de Surirey

J'ai vu Edouard de Mecquenem , il m'a quitté hier soir pour aller à 3 heures d'ici, il va bien. J'ai vu aussi Anatole de Maisonneuve  qui est resté pour moi un camarade, j'ai l'espoir qu'il sera bientôt chef de Bataillon, c'est un fameux militaire.
Adieu




 Devant Sébastopol le 10 juillet 1855.

Ma chère Fanny

    C'est seulement  hier que j'ai reçu ta lettre datée du 16 juin, tu me dis qu'il y a 2 mois que je ne t'ai écrit, je t'ai écrit à mon embarquement à Toulon, j'ai saisi l'occasion étant aux Dardanelles et aussitôt mon arrivée ici. Comment voulais-tu que je fisse pour t'écrire plus souvent. Cela m'a été impossible il n'y a pas de poste quand on se promène sur la meditérannée ou l'océan. Enfin me voilà ici, donc dans ma dernière lettre je te disais que j'étais secrétaire du colonel, je suis déjà démoli de ces fonctions (presqu'entièrement), mais en revanche je suis Sergent Major. Voilà 5 mois  que je suis au 26° et chacun de ces mois m'a apporté un grade nouveau, si cela continue je ne désespère pas de devenir Gal un de ces jours. Je ne vais aux tranchées qu'avec le Colonel, comme son secrétaire pour faire le rapport, je n'en suis pas faché car il y a trop peu de gloire à faire ce métier, il y fait une chaleur à rôtir un bœuf. Je pense être officier bientôt, par exemple si nous n'avons pas plus souvent de lettres l'un de l'autre à la 3e je t'annoncerai peut-être cette grande nouvelle.
    Je n'ai pas encore assisté à d'affaires sérieuses, mais enfin j'ai vu le feu, ce n'est pas du tout ce que l'on en pense, je croyais être émotionné bien plus. Il est vrai que je suis un drôle de bonhomme, je ne m'étonne pas souvent. Tu as sans doute fait ce que je t'ai dit pour Mme d'Hervillé, tu verras combien cela me fera de bien.
Allons adieu, je n'ai pas quitté ta médaille, seulement elle est toute noire. Je ne peux t'écrire plus longuement, adieu, je t'embrasse de tout mon cœur, donne de mes nouvelles à Pol, Alix et ma mère.
Adieu encore, tout à toi pour toujours.

A te de Surirey

Sergent Major à la 4e Cie du 2ème Bon du
26e Régiment de Ligne (1ère Brigade 1er Corps 1ère Division)
Devant Sébastopol.




 Devant Sébastopol le 31 Juillet 1855.

Ma chère Fanny,

J'ai reçu ta lettre il y a deux jours, elle n'est pas des plus réjouissantes, tu peux bien te plaindre car réellement la chance ne te favorise pas, mais sois tranquille, si je vais travailler pour nous deux, il faudra bien te résigner à venir vivre avec un capitaine, car vois-tu si j'avais le même bonheur que beaucoup je pourrais l'être dans 6 ans et je te promets que possesseur de cette position je te ferai tant de misère qu'il faudrait bien que nous coulions notre pauvre petite existence tous deux et tranquillement car enfin à cet âge nos folies seront passées complètement , du moins il faut l'espérer  et ma foi avec la petite solde tu verras que nous serons heureux, et puis je ne te sentirai plus avec des étrangers et cela ferai mon bonheur. Du courage ma bonne Fanny, je sais combien il t'en faut, mais mon Dieu, quand donc viendra un jour où nous pourrons sinon être heureux tout à fait, au moins avoir une position supportable. Tu le mérite bien, toi, il serait donc plus juste que ce soit toi qui commence que moi et c'est tout le contraire, mais sois tranquille comme je te le dis avec conviction je travaille pour nous deux. Ma nouvelle position est aussi bonne que possible, j'ai de l'ouvrage c'est à peine si  je m'en aperçois, tellement j'y vais de bon cœur.
    Dans ma dernière lettre, je ne te parle pas de notre bonne vieille Louise  , je me le suis déjà reproché et cependant je t'assure que ce n'est pas oubli, j'étais encore un peu sous l'empire de mon nouvel avancement, le courrier allait partir et je ne t'ai pas dis alors combien je prenais de part aux peines que la mort d'une aussi brave et digne fille pouvait causer à notre famille, je la vois encore toute joyeuse de notre arrivée. Pol et moi lui avons fait un bien grand plaisir.
Lorsque j'étais à Mélimée, j'ai prêché autant qu'il était possible pour que Pol vienne avec moi, je savais ce que je fesais, aujourd'hui il serait sous-officier et sûrement mon fourrier; mon Colonel qui plusieurs fois m'a questionné sur ma famille m'a dit tout nettement (c'est du reste un homme habitué à dire sa façon de penser) que c'était la plus grande bêtise qu'on ait pu faire. Hé bien maintenant tu peux dire à notre mère qu'elle prie Mr Wacquant, le Gal, de donner à Pol l'argent nécessaire pour qu'il ne se perde pas complètement   , puisqu'elle a eu tant de confiance en son frère elle doit la pousser jusqu'au bout, elle n'a pas eu sans doute assez de mon exemple en me faisant aller dans la cavalerie , il lui en fallait deux. Je ne te cache pas du tout ma façon de penser comme tu le vois, ce que je te dis du Gal c'est de l'ironie, tu le penses bien n'est ce pas. La seule chose qu'il y ait à désirer maintenant c'est que Pol fasse campagne le plus tôt possible, alors les bottes fines et les pantalons fins disparaîtront et ce sera déjà beaucoup, je le croyais posé mais c'est tout simplement de l'apathie. J'ai mauvaise grâce à lui jeter la pierre, aussi ce n'est pas ma pensée, je suis plutôt irrité contre ma mère à son sujet que contre lui. Je t'envoie 20 francs pour lui, dis lui que ne m'ayant pas répondu je ne suis pas tenté de lui écrire, que néanmoins je veux lui faire voir que je pense à lui, que quant à toi, tu ne peux plus rien lui envoyer, ainsi donc qu'il ait à faire son métier en bon soldat au lieu de dormir pendant que son camarade de lit lui astique ses effets. Anatole que je vois très souvent (j'ai encore déjeuné avec lui ce matin) m'a promis d'écrire à un de ses officiers s'il en a de connaissance au régiment, non pour protéger sa paresse mais bien pour le dégourdir un peu. Quel malheur qu'il ne soit pas ici avec moi, au moins j'ai la conviction d'avoir fait ce que j'ai pu pour qu'il y soit.
    De Mecquenem   est posté à 4 lieues d'ici  de sorte qu'il y a un mois que je ne l'ai vu. En revanche j'ai retrouvé un bien bon camarade dans Anatole, il est comme un véritable frère pour moi, et me disait que si Pol venait ici, il allait le sermoner un peu bien s'il ne fesait pas ce qu'il faut. Je vais souvent passer la soirée avec lui, il est à 20 minutes de moi.
    Nous nous attendons à un grand coup de chapeau d'ici à quelques jours, le sang court plus vite dans nos veines toutes les fois qu'on en parle nous voudrions déjà y être, il n'y a pas, il faut que j'y gagne quelque chose . ma santé est toujours bien bonne, seulement il y a deux jours elle a pris un fameux bain, nous avons eu une pluie affreuse qui a innondé complètement ma tente, mais ma foi, lorsque j'ai vu ma comptabilité sauvée je me suis fait une bonne quantité de bon sang.
Tu écriras à ma mère et tu lui diras que je lui écrirai prochainement, que seulement cette fois je lui ferais des reproches au sujet de Pol et je ne le veux pas. Dis à Alix que je ne lui écris pas encore. J'écris sur mes genoux et quoique je barbouille ma lettre  pourtant cela n'en est pas moins difficile; lorsque tu recevras cette lettre, la tienne en réponse de ma dernière sera bien près de m'être parvenue aussi car je suis en avance d'une lettre sur toi. Je ne pourrai peut-être pas toujours t'écrire longuement, mais cette fois j'ai le tems et j'en profite de bon cœur. Je t'envoie 200 francs, mon cœur bat de joie en t'offrant cette bêtise là, j'ai touché cela pour mon rengagement ici, avec ma solde je fais encore des économies aussi tu vois bien que je ne suis pas malheureux. Ton Ouaké est-il bien noir, moi j'ai toujours  ta médaille, elle est aussi noir que de l'encre.
    Tu dois avoir vu Irma, dis lui toujours combien je l'aime, c'est une bien bonne femme. Comment a-tu trouvé Louise de Pouilly  . Allons je vais te quitter, il se fait tard et ma vieille peau de mouton (que j'ai […?]) me tend les bras, il fait chaud dans la journée et nous avons pas mal couru aujourd'hui. Adieu ma vieille Fanny, du courage, penses que je comprends bien combien tu souffres, confie moi bien tes peines, que je n'ignore rien, au moins je serai plus tranquille sachant à quoi m'en tenir. Adieu, je t'embrasse de tout mon cœur, j'espère qu'un jour ce ne sera pas sur du papier mais bien sur tes deux joues, et que nous mêlerons encore une vieille larme d'amitié ensemble.
Je t'embrasse de tout mon cœur. Tout à toi, ton frère.

A te de Surirey



Lettre du Baron Christophe à Fanny:

 Mademoiselle,

Je ne m'attendais pas à vous écrire à mon retour de voyage, tout allant bien pour vous en Crimée. Mon ami le Général Niol, dans une lettre du 16 août m'annonçait que votre frère était pris d'une légère attaque de Choléra qui sévissait de nouveau avec les grandes chaleurs; il me disait: "de Surirey est pris, mais j'espère qu'il s'en sauvera; je le ferai bien soigner; demain avant le départ du Courrier, je vous donnerai de ses nouvelles."  Le 18: "de Surirey va mieux ce matin, je pense qu'il est hors de danger; dans la journée, j'irai encore le recommander à l'ambulance." Je fus au Hâvre sans inquiétude, préférant ne pas vous donner ces détails et vous chagriner.
Je ne puis que vous donner copie de la lettre que je trouve en rentrant, vous encourageant à conserver vos forces, votre courage pour en donner à votre pauvre mère, à votre famille. Ce 21 août 1855. "Quelques lignes, cher ami, pour vous donner une mauvaise nouvelle, votre jeune protégé, le Serg t  Major de Surirey est mort aujourd'hui à 11 heures. Tous les soins que j'ai  pu lui faire donner ont été impuissants! Ce bon garçon avait déjà su se faire aimer au 26 ème par ses bonnes qualités; l'armée perd un bon soldat, le régiment un bon sujet, un bon camarade." Ma mission est triste, j'avais rêvé mieux que cela pour votre intéressant frère. Agréez, mademoiselle, mon respect et mon compliment de condoléances ainsi que ceux de ma femme qui est en ce moment à la Madeleine avec la pensée du brave Serg t Major du 26 ème.

Votre dévoué serviteur
Bon Christophe
Ce 4 septembre 1855.

Au moment de fermer ma lettre j'en reçois une de Sébastopol du 25, qui me dit: " j'ai fait enterrer votre jeune protégé de Surirey; je vous envoie 500 f qu'il avait sur lui; il y a de plus 5 napoléons qui serviront à liquider ce qu'il peut devoir et qui ne dépassera 30 ou 35 f. je vous adresserai ce qui restera avec le premier envoi que je ferai à ma femme. Il n'avait rien de précieux, ni montre ni bourse etc etc."
Je conserve ce bon sur le trésor payable à l'ordre de M de Surirey, il a le N° 22756. Vous me direz, je vous prie, ce que je dois en faire. Je pars demain pour Fontainebleau pour 10 jours et vers la fin du mois pour la Belgique.

 


Lettre du Général de WACQUANT à sa sœur Thèrèse de SURIREY de SAINT REMY :

Poitiers le 19 septembre 1855

Ma chère sœur, je partage bien vivement la peine que tu ressens de la perte de ton fils Auguste que le choléra vient emporter si malheureusement quand un avenir tout à fait meilleur semblait se préparer pour lui et te donner en même temps une satisfaction bien grande quoiqu’un peu tardive.
C’est une bien triste épreuve à laquelle il faut avoir la force de se résigner, non que je la trouve moins affligeante parce qu’elle est applicable à bien des mères dans ces dernières circonstances… Mais si une pensée consolente peut se joindre à la douleur maternelle en pareil cas, c’est celle que ton fils est mort en remplissant bien tous ses devoirs. Je te répète donc, ma chère sœur que je m’associe très sincèrement à tous tes regrets.
Je te prie de me rappeler au souvenir de tout ce qui t’entoure et de recevoir pour toi la nouvelle expression de mon bien sincère attachement.

Général de Wacquant






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