Correspondance de Louis Michel SURIREY dE SAINT REMY

Recommandation de louis-Michel auprès du grand Bailly de Tournay:
 
A Monsieur
Monsieur Van der Gracht
Grand Bailly de Tournay
Et du Tournaisis
En son hôtel
A Tournay

A Paris ce 7. 7bre 1742

Monsieur de Boissy, qu'un mouvement de curiosité engage a parcourir les Paÿs bas, sçachan mon cher gendre ce que nous sommes l'un a l'autre, m'a prié de luy donner une lettre de recommandation pour ma chere commere, pour vous, et pour ma fille. Je saisis cette occasion avec d'autant plus de plaisir, que Mr de Boissy est un cavalier extresmement aimable, et que vous Me sçaurez gré de vous avoir procuré une pareille connoissance. Recevez le donc avec grace et politesse; procurez luy tous les plaisirs qui dépendront de vous; enfin soyez persuadé que tout ce que vous ferez pour luy, je le regarderay comme si cela me touchait personellement. J'espère Mon cher gendre que ma lettre fera l'effet que je souhaite, et vous rends trop de justice pour en douter un moment. Je finis, et vous embrasse, ainsi que ma fille et mes petits enfants.

Latourdupin

Assurez ma chere commere de mes respects tres humbles.


Note: Louis-François van der Gracht, chevalier, seigneur de Grand Rieux Fretin, Steenbrugge, etc, Président, Grand Bailly de Tournai et du Tournaisis, a épousé Philis-Marie de la Tour du Pin La Charce( née à YPRES le 29/6/1717 et + TOURNAI le 28/3/1769)
 


Monsieur

Je vous suis bien obligé de l’avertissement que vous donnés de l’arrivée de Mr de Segur avec le corps qu’il commande a Braive, nous venons d’envoier ordre au Capitaine Le Roux qui fait les fonctions de commissaire du Paÿs a Huÿ , de se rendre sur le champ a Braive et de s’aboucher avec vous pour ÿ prendre ensembles les mesures les plus convenables au cas qu’on ne puisse fournir les rations, ce que nous ne pouvons savoir ici, ignorant les ordres que Mr le Comte d’Eÿnatten peut avoir donnés aux villages circonvoisins pour fournir les Rations a Tongres et qu’il n’ÿ eut plus rien a fourager dans les campagnes et qu’ils voulussent fourager dans les granges, du moins ce fouragement se fit d’une maniere que les maisons ne fussent pillées en mettant à la tete des villages une certaine portion de fourages et grains en paille qui se trouvent dans les granges, et de demander a Mr de Segur les ordres et troupes necessaires pour empecher les marodeurs de piller les maisons et d’entrer dans les villages : s’il se peut que puissiés rester quelques jours avec ce corps, vous nous ferez grand plaisir de vouloir bien aider de vos soins le capitaine Le Roux dans cette facheuse operation. Nous recommandons de vouloir bien faire en sorte que les troupes donnent des Reçus et quittances de ce qui leur sera fourni, je suis parfaitement
     Monsieur

Liege le 21.                          votre tres humble et tres
7bre 1746.                                obeissant serviteur
de Breidbach



Notes :
- Cette lettre évoque la campagne des armées françaises commandées par le Maréchal de Saxe en Flandre pendant l’année 1746. Cette campagne est un épisode de la guerre de succession d’Autriche (1740-1748) qui oppose la France aux PAYS-BAS, à l’AUTRICHE et l’ANGLETERRE. Quelques jours après, le 19 septembre la ville de NAMUR capitule et le 11 octobre aura lieu la bataille de ROCOUX.
- Le Comte Philippe Henri de SEGUR (1724-1801), futur maréchal de France, commande alors une brigade légère d’infanterie.
- Le Comte d’Eÿnatten appartient à une très vieille famille du pays de LIEGE.




Monsieur

J'ay été on ne peu pas plus sensible a l'obligeante lettre que vous avez bien voulu m'ecrire au sujet de la grace que S.A.S. a daigné me faire de me nommer son grand maitre, elle m'est d'autant plus agreable, qu'elle me donne des marques certaines que vous ne m'avez point effacé de votre souvenir, et que vous voulez bien prendre un peu de part a ce qui me regarde, dont je vous fais bien sincerement mes remerciements, je serais enchanté si ma nouvelle charge me procurera les moiens de vous etre bon a quelque chose, et de pouvoir vous convaincre que rien n'égale les sentiments distingues et la parfaitte consideration dans laqu'elle j'ay l'honneur d'etre

Monsieur                        Votre tres humble
                                            et tres obeissant serviteur
Liege ce 14 aout                le Cte Velbruck
        1759


Notes:
-"Son Altesse Sérénissime" désigne le Prince-évêque de Liège.
- Le comte François-Charles de Velbruck est né à Düsseldorf en 1719 et mort à Tongres en 1784.
Il s'installe définitivement à Liège en 1759 où il devient premier ministre du prince-évêque Jean-Théodore de Bavière. Auprès de son maître, Velbruck mène habilement une politique pro- française qui lui vaut de recevoir des mains de Louis XV la commande de l'abbaye royale de Cheminon en Champagne.
Le 22 octobre 1771 il deviendra à son tour Prince-évêque en succédant à Charles louis d'OULTREMONT. Sur le trône épiscopal, il entend appliquer dans le gouvernement de son pays les principes que les Encyclopédistes français ont déjà introduits dans la Principauté de Liège et qui visent au bien général du peuple "devenu la véritable, la seule religion de l'Etat". Franc-maçon, s'intéresse aux idées du temps: celles des philosophes et des encyclopédistes. Forte personnalité il veut rassembler quelques "convertis" en un cercle de discussions artistiques, littéraires ou scientifiques; il est à l'origine de la fondation de deux institutions culturelles : en 1754, une Académie des Beaux-Arts et en 1779 la Société libre d'Emulation.


 
A La Haye le 14 juillet

Je viens de recevoir icy, monsieur, votre lettre du 3 qui ma eté renvoiée d'Aix La Chapelle, que nous avons quitté le 2, le tems des Bains etant passé pour cette saison, je suis outré de n'avoir pas sçu plutot, que vous aviés envie de faire un tour en Holande, nous aurions eté tres aise Mr le Duc de Villars et moy de vous avoir avec nous, et rien n'aurait eté plus aisée, nous avions une place vuide dans les carosses , que nous aurions eté bien aise de voir remplie par vous, sans qu'il en eut rien cousté ni a vous, ni a Mr de Villars; mais presentement la chose devient impossible parce que nous sommes dèsja bien loin et nous aurons vu une partie des choses que nous avions à voir, nous avons arresté a Dusseldorf, Vezel, Nimegue, Utrechk, et nous sommes arrivé hier icy, ou jay trouvé votre lettre; nous comptons partir dans 2 jours pour Roterdam, ensuite faire un tour a Amsterdam, puis reprendre le chemin de France, a moins que la santé de M de Villars, qui n'est pas  meilleure depuis les bains, ne nous contraigne de retourner a Aix la chapelle, prendre la seconde saison, voilà a peu pres  la marche que nous devons tenir, mais dans le vray, on ne peut etre plus faché que je le suis de n'avoir pas sçu plutôt vos intentions. M de Villars me charge de vous assurer aussi qu'en son particulier, il aurait eté charmé de vous procurer ce petit plaisir, qui nous en aurait fait un tres grand; je crois que vous nen doutés pas, jay l'honneur d' etre tres parfaitement Monsieur
                            votre tres humble
                            et tres obeissant serviteur
                                            De Salins




 A Versailles le 3 septembre 1763,

Je suis fort aise monsieur que vous ayiez eu lieu d'estre satisfait de la manière dont s.a.R. vous a traité avant son départ. Je serais infiniment flatté si l'interest que j'ay pris auprès d'elle a ce qui vous regarde avait contribué en quelque chose aux marques de bienveillance qu'elle vous a données. Je ne le seray pas moins s'il se presente quelque nouvelle occasion de vous marquer le plaisir que j'auray toujours a vous obliger et a vous donner des preuves du très parfait attachement avec lequel j'ay l'honneur d'estre monsieur votre très humble et très obeissant serviteur

De Paule


Note:
- Il s'agit peut-être de Joseph Hyacinthe François-de-Paule de Rigaud, comte de Vaudreuil, né à Saint-Domingue le 2 mars 1740 et mort à Paris le 17 janvier 1817, lieutenant-général, Grand Fauconnier de France, Pair de France, gouverneur du Louvre, membre libre de l'Académie des beaux-arts,  connu pour avoir été l'amant de Mme de Polignac, favorite de la reine, et l'ami du comte d'Artois.
- l'altesse royale évoquée, n'est bien sûr pas le roi de France mais probablement son frère le comte d'Artois, futur Charles X.



Liege le 21 fevrier 1763

Monsieur

J'ai reçue la lettre que vous m'avéz fait l'honneur de m'ecrire le 30 du mois passé. Je vous suis sensiblement obligé de la part que vous vouléz bien prendre a la vive douleur que m'a causée la perte de notre auguste Maitre, j'ai ressenti plus que personne toute l'amertume de ce fatal evenement et je sens en meme tems que c'est a la religion qu'il faut recourir pour trouver en elle la veritable consolation, celle que vous vouléz bien me donner m'est une nouvelle preuve de vos attentions pour moy, je vous prie de me les continuer et d'etre bien persuadé que je les merite par la sincerité des sentiments avec lesquels j'ay l'honneur d'etre

Monsieur
                                Votre tres humble
                                et très obeissant serviteur
                                Le Cte de Velbruck


Note: le Prince-évêque de Liège, Jean Théodore de Bavière, est décédé le 27 janvier 1763.


 
A Versailles le 28. janvier 1764.

J’ay fait monsieur remettre exactement a mad- de Surirey le paquet que vous m’avez adressé pour elle. Je suis fort aise que cette occasion m’ait procuré l’avantage de recevoir de vos nouvelles.
Je n’ay pas été moins touché des malheureux succès de notre cher Prince par rapport a vous que pour lui mesme. J’ay peine a croire qu’il y ait du retour. Je desirerais infiniment qu’il se presentat quelque autre occasion de vous estre utile. Je vous prie d’estre assuré que vous pouvez dans tous les temps disposer de moy.
J’ay l’honneur d’estre avec un très parfait attachement monsieur votre très humble & très obeissant serviteur.

De Paule




 Turin ce 16 Xbre 1769 .

Ne croyez pas, mon cher seigneur, que ce soit négligence si je me réponds à votre lettre en date du 24 8bre qu'un mois après l'avoir reçûe. Vous verrés par la lettre cy jointe de M. Robert les raisons des retards que vous eprouvés. J'ay vû tous vos gens d'affaire, vôtre avocat, vôtre procureur, qui tous ne font que revenir de la campagne. Robert luy même en arrive et il a fallû luy mettre l'épée dans les reins pour en obtenir depuis son retour le peu de démarches en conséquences desquelles il vous écrit aujourd'huy; vous devez être persuadé, mon cher, de l'interet que je prends au vôtre dans ce paîs cy; je me suis annoncé comme vôtre solliciteur, je soutiendray ce titre et ne negligeray rien pour hâter, autant qu'il sera en moy, le succès de vos affaires.
Parlons maintenant de vos plaisirs à Namur, de la satisfaction que vous avez eüe avant de revoir votre famille, de celle que vous avez aujourd'huy de vivre dans la paix de votre petite maison, et de vous y reposer des fatigues du voyage. Je vous y souhaite longs jours, joye, prosperités et santé. Donnés m'en des nouvelles, la mienne est toujours chancellante après huit mois de régime et de diète blanche, les médecins m'avaient remis à la vie ordinaire, mais je viens d'avoir une troisième attaque; le crachement de sang est revenû, je me suis fait saigner hier et suis aujourd'huy obligé de dicter pour causer quelques momens avec vous; partagés je vous prie avec le Mis Spontin  mille et mille complimens et croyés que personne au monde n'est plus sincerement que moy

  Votre très humble
 et très obeissant
serviteur

                          de Sainte Croix


Note: l'auteur est probablement le chevalier Louis Claude Bigot de Sainte Croix(1744-1803), secrétaire a l’ambassade française de Turin.



 Monsieur,

Je suis très sensible au témoignage obligeant que vous avez bien voulu me donner de votre souvenir et de votre attention à l'occasion du renouvellement d'année. je vous remercie, Monsieur, bien cordialement de tous les souhaits que vous me faites, et vous assure que les miens pour vos satisfactions ne sont ni moins étendus ni moins sinceres.
J'ai informé le Roi des sentimens que la même circonstance vous a donné motif d'exprimer à son égard, et j'ai le plaisir de vous faire savoir qu'ils lui ont été très agréables.
Je n'ai point perdu de vue l'affaire de made Grosse que vous m'avez recommandée. Mais depuis votre départ il ne s'est rien passé où je pus lui être utile. Les affaires de la Compagnie anglaise sont toujours à peu près dans le même état où vous les avez laissées, par la raison que Mr Duteins faisait toujours esperer de recevoir les procurations des interessés qui l'autoriseraient à convenir de quelque arrangement, et qu'il est ensuite parti pour Milan depuis environ deux mois sans les avoir reçues.
Je viens d'apprendre depuis quelques jours qu'elles lui sont parvenues, à présent il faut attendre son retour, ou qu'il donne commission à quelqu'un de traiter en son nom. Soyez bien persuadé que quand je pourrai trouver jour à m'employer pour Made Grosse, je le ferai avec tout le plaisir que je vous ai témoigné.
Je suis avec un sincère et parfait attachement,
Monsieur,

A Turin ce 27. janv.
        1770.                                                          Votre très humble et
                                                                          très obéissant serviteur
                                                                                Raibavin


Note: le roi dont il est question est le Roi de Sardaigne et de Piémont dont la cour est à TURIN



  A Paris ce 6 novembre 1770.

Je vous envoye ci joint, Monsieur, la lettre de recommandation que vous me demandéz pour mr le Prince de Starhemberg. Je souhaite de tout mon cœur qu'elle produise les effets que vous desiréz. Vous saviez du moins ma bonne volonté  et combien j'ay a cœur de vous convaincre que personne n'a l'honneur d'etre plus parfaitement que moy, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur.

Aubeterre


Notes:
- le prince de Starhemberg (1724-1807) est l'ambassadeur d'Autriche en France.
- L'auteur est probablement son cousin issu de germain le  vicomte Henri Joseph Bouchard d'Aubeterre. Joseph-Henri Bouchard d'Esparbez, marquis d'Aubeterre, né le 24 janvier 1714, Maréchal de camp (1748), Ambassadeur à Vienne (1752), à Madrid (1757),Lieutenant Général (1758), Ambassadeur au Congrés d'Augsbourg (1761), à Rome (1763), Maréchal de France (1783) et mort le 28 août 1768.




 A Paris ce 8 de l'an 1771.

J ay reçu, Monsieur, la lettre dont vous m'avez honoré le 30 du mois dernier. Je désire fort que la lettre de recommandation que je vous ay envoyée pour mr le prince de Starhemberg puisse vous etre utile. Je vous remercie de ce que vous voulez bien me dire d'obligeant sur la nouvelle année, ne doutez pas de la sincérité des vœux que je forme pour tout ce qui peut vous interesser. Soyez persuade aussy je vous prie du parfait attachement avec lequel j'ay l'honneur d'etre, monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur.

Aubeterre



 A Versailles le 13. novembre 1770.

Je suis monsieur peu connu de Mr le Baron de Bon. J’espere cependant qu’il se souviendra de moy m’ayant vu souvent a l’armée & quelquefois icy depuis son retour d’Allemagne, quoyque ma recommandation soit peut estre d’un mediocre prix auprès de luy je n’ay pas voulu laisser echaper cette occasion de vous estre de quelque utilité & de vous marquer le sincere & très parfait attachement avec lequel j’ay l’honneur d’estre monsieur votre très humble & très obeissant serviteur.

De Paule


Note: le Baron de BON est un diplomate français.Il fait partie des ambassadeurs admis à la correspondance secrète de Louis XV  et travaillant en étroite relation avec le Comte de BROGLIE.




 Lettres du Baron Louis-César de Choiseul
à Louis Michel de Surirey de Boissy

Louis-César de Choiseul, neveu de l'illustre ministre des affaires étrangères de Louis XV, est né le 6 juin 1734. Il épousa la fille unique du propriétaire du Château de Sermoise, Marie Girard de Vanne.
D'abord attiré par le métier des armes, Monsieur de Choiseul fut lieutenant des gendarmes dauphins, puis maréchal des camps et armées du Roi.
Il s'orienta ensuite comme son fameux oncle vers la carrière diplomatique et fut nommé ambassadeur de France à Turin auprès du Roi de Piémont-Sardaigne. Il s'agissait là d'un poste très important, compte-tenu des liens familiaux et politiques très étroits unissant la France et le Piémont-Sardaigne qui incluait alors Nice et la Savoie.
Le baron de Choiseul occupa ce poste pendant plus de vingt ans avec succès. La Révolution mit fin à sa mission.
D'esprit ouvert, le baron de Choiseul accueillit avec bienveillance, et habileté, les idées nouvelles. A son retour de Turin en 1792, il rentra au château de Sermoise, où il ne fut pas inquiété par les révolutionnaires, à l'exception d'une courte période durant laquelle il dut se cacher au château de Sancerre.
La correspondance diplomatique du baron de Choiseul occupe plus d'une dizaine de gros volumes reliés, conservés à la bibliothèque du Ministère des Affaires Étrangères à Paris, ce qui démontre l'importance du rôle rempli par l'ambassadeur de France.
La lecture de ces lettres révèle une culture très réelle, ainsi qu'une grande finesse de jugement et de sentiment.
Le baron Louis-César de Choiseul était commandeur des ordres royaux, militaires et hospitaliers de Notre Dame du Mont Carmel et de Saint Lazare.




 A Turin le 7 7bre 1769

Vous avez  a present, mon cher Boissi, reçu ma lettre et ma justification d'avoir mis tant de tems a vous remercier du zele et de l'intelligence avec les quels vous aviez bien voulu faire ma commission. Il faut que je calcule encore avec mes femmes pour vous parler de nos projets definitifs, et avoir l'avis des ducs [sur] cette affaire qui n'en est pas une d'état, n'en est pas moins importante pour nous.
Je crois que vous aurez trouvé les grenadiers de France un peu plus beau et plus propre que le regiment des fusillers et que celuy de Turin. Vous ne me dites rien de particulier de la gendarmerie, mais je me flatte que vous aurez regardé avec un peu d'interet la compagnie des gendarmes dauphin. Si vous aviez eu le tems vous auriez vu bien des gens de ma connaissance et qui m'ont aimé pendant le feu de ma jeunesse. J'étais gaillard étourdi et bon enfant.
Je pars la semaine prochaine pour mes chères penates j'y trouverai suremen de vos nouvelles, je vous en donnerai des notres, vous savez mon cher Boissi, que made de Choiseul partage mes sentimens pour vous, vous devez en être aussi persuadé que du tendre attachement avec lequel j'ai l'honneur d'etre mon cher Boissi votre tres humble et tres obeissant serviteur.

Choiseul

J'ai fait vos complimens selon vos souhaits, je suis chargé de vous en faire d'infinis, Ste Croix est chargé des affaires pendant mon absence, made de Kevenhuller fait craindre d'etre encore plus incommodée pendant cette grossesse que lorsqu'elle portait Leopoldine.
Adieu, il n'y a ici rien qui puisse vous interesser.

Notes:
- l'intérêt porté aux grenadiers de France est naturellement lié à l'appartenance de Pierre de SURIREY, fils de Louis-Michel , à ce corps (jusqu’en décembre 1769); par ailleurs les Gendarmes Dauphin sont le corps d'origine du baron de Choiseul.
- il s'agit de la princesse Marie-Amélie de Liechtenstein épouse du prince Johann Sigismund von Khevenhüller-Metsch
, ambassadeur de l'Empire à la cour de TURIn de 1763 à 1770.



 A Turin ce 20 7bre 1769                            X le 24. 8bre

J’ai reçu il y a longtems, mon cher Boissi, votre lettre de Schaffouse du 18 du mois dernier, j’en ai envoyé copie a mad e de Choiseul, qui a été aussi reconnaissante que moy de l’interet et de l’amitié que vous nous avez montré,  - quoiqu’il n’ait rien a desirer sur un plus grand nombre d’éclaircissemens, nous sommes toujours dans l’incertitude Il n’est plus question que de savoir si on poussera nos appointemens aux 100 mille livres, vous connaissez ma delicatesse scrupuleuse, je ne voudrais ny ne pourais tirer parti d’une caisse qui m’est confiée ny d’autres ressources, je ne reconnaitrais de revenu que celuy que je pourrais avouer tout haut. Autre consideration, j’aurais ici selon les apparences une affaire agreable a negocier, elle ne sera, selon les apparences, terminée qu’en 1771. Je dois craindre qu’alors le successeur de mr le Ch er de Notteville qu’on dit deja designé, ne soît nommé. Je pars pour le Nivernais le mois prochain, je serai a Paris en decembre, votre lettre, mon cher Boissi, sera encore révisée dans notre petit comité, elle satisfait mon gout et tout ce que j’attendais de cette residence, mais vous savez, mon cher Boissi, que dans ce monde on agit plus pour les liens, pour le public, que pour soy meme. Mad e de Choiseul doit accoucher a la fin du mois prochain. Si elle fait une troisieme fille, alors nous devenons plus libres, ce ne sont pas quelques honneurs, une cinquantaine de mille livres de plus ou de moins qui les établissent, un fils pourrait me reprocher de n’avoir pas mis a profit toutes les circonstances favorables, une grande ambassade encore ? ? ? grandes places, si ceux qui en jouissent en ont tout l’ennui, ceux qui les suivent en profitent.
Je ne veux pas, mon cher Boissi, vous fatiguer de mes incertitudes, je vous prouve seulement que nos relations sont mêmes affermis une premiere idée et que je desirerais qu’il ne s’y rencontra aucun obstacle, ce sera la premiere affaire qui m’occupera a mon arrivée a Paris, je vous ferai part de ma derniere resolution. Si mad e de Surirey est de retour demandez luy, je vous prie, son agrement pour que j’aie l’honneur de la voir, je chercherai aussi de faire connaissance avec messieurs vos freres, et j’espere que je la renouvellerai avec mr de Surirey mon ancien camarade de voyage, faites luy, je vous prie, mille complimens de ma part.
Notre ville est toujours dans le même état de langueur, ny promotion, ny plaisirs, les plaisanteries de l’empereur sur le grand habit de cour que les dames du palais portaient dans les coupés, a la chasse, ont engagé le roy de Sard. a donner des habits uniformes, ce ne sont pas des amazones mais des robes dites sultanes, rouges et  ? ? ? galonnées en argent, lundi prochain sera le premier jour de ces belles choses.
Depuis le depart de mad e de Choiseul, je me suis lié davantage avec la maison Kev. On dit que je suis amoureux de made, pour moy je crois que c’est elle qui l’est de moy , j’ay toute sa confiance, sa femme qui malgré les preventions me croit un honnete homme, m’en accorde aussi, plus je vois les intrigues, et ce cloaque d’iniquités, moins j’y comprends, si je croyais a la magie, je serais persuadé qu’il y a un sort, quoiqu’il en soit, on est obligé de refuser son estime a tant de charmes.
Entre nous, le Ch er Thomali paraît trouver le joug un peu lourd, cela va d’honneteté et de reconnaissance, je suis toujours mon meme train de vie, sans me meler dans aucun tripotage. Les societes multipliées sont presque desertes, je n’aime pas y faire le role de tiers aussi je reste souvent chez moy, on m’en aime davantage me connaissant moins.
Ste Croix est toujours dans un état critique, il n’ose pas quitter son regime de lait.
J’ai distribué avec intelligence vos respects et complimens, on vous en fait d’infinis.
Donnez moy de vos nouvelles a Nevers, entrez avec nous dans les details qui vous interessent, vous savez que nous y prendrons une part bien vive, les sentimens pour vous sont une suite du tendre attachement que je vous ai voüé et avec lequel j’ai l’honneur d’être, mon cher Boissi, votre tres humble et tres obeissant serviteur.

Choiseul

Le marquis d’Ain est remarié, il a épousé mlle d’Hassan. Je vois beaucoup mr Dutins qui accompagne milord Perci, Carburi et autres, l’absence de mad e de Choiseul ne m’a pas fait d’economie, nous avons eu plus de passage en quatre mois qu’en deux années. J’attends dimanche mr et mad e du Puy Montbrun  avec le Cte de Bernis qui vont a Rome rejoindre le cardinal leur  oncle.


Notes:
- Madame de Surirey ne peut être que la femme de Louis-Michel; sa mère est en effet décédée, et ses frères sont célibataires.




 A Paris rue de Verneuil ce 4 avril 1770.

J'ai reçu dans lontems, mon cher Boissi, la lettre dont vous m'avez honnoré le 11 du mois de mars, et j'y vois que ma derniere ne vous est point parvenue. C'est quelquefois le sort du contre seing. Vous risquez le prix de celle ci parce que je veux vous dire combien j'ai été flatté de faire connaissance avec madame de Surirey , je l'ai trouvée chez elle, c'est une femme d'esprit du meilleur ton qui a été avec mille grâces l'interprete de votre amitié pour nous, aussi l'ai je trouvé tres éloquente. Elle m'a dit avoir terminé avec le maire de Beaune, le vin que vous avez reçu ne doit être bu que l'hiver prochain, il est tout simple qu'il vous ait pour ?.
La douce uniformité de ma vie à Turin, le calme ? de mon existence pendant quatre mois à Nevers, ont anneanti mon activité naturelle, et me rendent insuportable le séjour de Paris. Je passe mon tems en ? et en visite. Ma sensibilité m'avait fait redouter mon premier abord dans la capitale, l'accueil que j'ai reçu de mes parents et de mes amis m'a bien rassuré, ils m'ont montré le plus vif interêt, et il paraît qu'on me conserve la mesme amitié.
Je laisse à mad de Surirey  a vous instruire des assemblées des chambres et des procès. Le fameux procès du duc d'Aiguillon occupe tous les esprits, et fait oublier les maux qu'ont causés les opérations de finances de l'abbé Terray, je n'ai pas la tête assez ?  pour entreprendre de vous exposer au nez ces differents objets.
J'ai vu la nouvelle salle de Versailles, c'est la plus belle chose du monde, il n'y a rien d'egal en Italie. Il est vrai qu'elle serait insuportable pour le genre des spectacles de ce pays la, puisqu'elle exige de la toillette et du maintien, ce qui est impraticable quand on est cinq heures sans pouvoir ny vouloir entendre.
J'ai laissé ma femme en bonne santé, j'ai perdu ma troisieme fille, les deux ainées me consolent de ce malheur au quel nous avons cependant été tres sensible.
Faites agreer mille sinceres et empresses complimens de ma part a votre fils, et recevez mon cher Boissi, l'assurance du tendre et inviolable attachement que je vous ai voué.

Notes:
- Le duc d'Aiguillon, est ministre de Louis XV; ancien gouverneur de Bretagne, il est depuis plusieurs années en procès avec des membres du parlement de Bretagne. Cette opposition étant l'un des épisodes majeurs de l'action menée par le pouvoir royal pour réduire le pouvoir politique des parlements de province.
- L'abbé TERRAY est le Contrôleur général des finances.
- Pierre Louis de SURIREY a été nommé  lieutenant-colonel le 30 décembre 1769




 A Paris ce 17 aout 1770.                      X le 23 aout 1770.

Votre lettre du 4 de ce mois, mon cher boissi, m'a tiré d’un doute, je ne savais qui de nous deux avait interrompu la correspondance, mde de Choiseul sera temoin que j'ai eu plusieurs fois dessein de rompre le silence dusse être a vous a me repondre; quoique vos reproches soient injustes, je suis fort aise même d'avoir tort puisqu'ils me procurent de votre part un nouveau temoignage de votre amitié. J'étais parti de Paris a la fin de juin, croyant n’y plus revenir, mais j'ai été mandé à Compiegne pour y recevoir des ordres relatifs au mariage de mr le Cte de Provence qui a été acceleré devant avoir lieu au mois de may prochain. Je pars demain pour la campagne et le premier 7bre je me mettrait en marche pour me rendre a Turin ou je n'arriverai cependant que le premier 8bre, ayant permission de traverser la Suisse pour voir par moy même si je n'ai pas été séduit par tout ce qu'on dit de cette residence. Vous me ferez plaisir de me mander  a Gy en Franche Comte chez mr le cardinal de Choiseul ; la façon de voyager dans ce pays la, je compte aller en poste jusqu'à Bâle et de la prendrai des chevaux de louage de ville en ville, en trouve t on facilement, enfin distribuer moy mon itineraire de maniere qu'en 15 ou 20 jours je puisse aller de Bâle a Lausanne en en restant 3 ou 4 a Soleure et voir un peu la Suisse, il faut que votre lettre soit du 2 au 5  7bre a Gy. ne pouvant y faire plus de sejour.
Je mets dans mon porte feuille votre memoire dont je ferai a mon arrivée a Turin l’usage que vous me prescrivez, je vous rendrai compte de ce qui vous interesse. Je vais ecrire a mr de Ste Croix pour qu’il s’informe du sort de votre caisse. J’ai été plusieurs fois chercher madame de Surirey que je n’ai vu qu’une fois, je n’en ai pas moins eu de regret de n’avoir pu cultiver une connaissance aimable avec laqu’elle je m’entretenais de vous. Mde de Choiseul vous conserve les sentimens que vous luy connaissez pour vous, elle me charge de vous faire mille empresses complimens de sa part, adieu, mon cher Boissi, rendez justice et payez de retour sans ? le tendre attachement que je vous ai voué.

Choiseul


Notes:
Le Cardinal de Choiseul, frère du Grand Choiseul, réside au château de GY.
Le comte de Provence est bien sûr le futur Louis XVIII qui épouse  Louise Marie Joséphine de Savoie




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